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Ghardaïa:l’oasis qui emerge du desert

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Ghardaïa:l’oasis qui emerge du desert Empty Ghardaïa:l’oasis qui emerge du desert

Message  Jazairi Lun 21 Jan - 20:35

La cité des mille et une passions
Ghardaïa:l’oasis qui emerge du desert Ghardaia2006

Perchée sur une colline et nichée au cœur de sa splendide palmeraie, Ghardaïa se déploie en effet dans une suite d’architectures qui témoignent de son histoire millénaire. D’un côté, il y a le désert et ses interminables étendues ocres. De l’autre, Ghardaïa dont la mosquée avec son minaret qui perce le ciel pur et défie le soleil étincelant.



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Ghardaïa, la simple évocation de cette ville est vraisemblablement déjà une évasion. Telle une oasis qui se détache du désert, cette cité aux multiples visages est non seulement le berceau d’une civilisation ancestrale, mais aussi un lieu de pèlerinage pour des touristes étrangers comme nationaux qui veulent découvrir son architecture exceptionnelle et particulière des k’sour de la vallée. Perchée sur une colline et nichée au cœur de sa splendide palmeraie, Ghardaïa se déploie en effet dans une suite d’architectures qui témoignent de son histoire millénaire. D’un côté, il y a le désert et ses interminables étendues ocres. De l’autre, Ghardaïa dont la mosquée avec son minaret qui perce le ciel pur et défie le soleil étincelant.
De prime abord, il est difficile pour le commun des mortels de ne pas s’émerveiller devant le génie scintillant d’hommes qui n’avaient que leur courage à faire prévaloir sur des terres stériles et arides pour bâtir une pentapole en dialogue permanent avec la lumière et en perpétuelle quête d’ensoleillement.

Un joyau architectural
En entrant à Ghardaïa par la porte ouest, une vue panoramique de la cité s’offre aux visiteurs et d’après la légende, Cheikh Baba Ould Jema, en remontant la vallée du M’zab, aperçut une lueur sur ce col. En s’approchant, il trouva une femme du nom de Daya, habitant une grotte. Par la suite, il épousa cette femme qu’on nomma plus tard Lalla Sahla. Plusieurs versions de la dénomination de la cité sont données par les historiens. Toutefois, selon Cheikh Tfeych, le nom de la cité est lié à la grotte de Daya qui veut dire en arabe Ghar-Daya. Ghardaïa naît à partir de ce moment là et devient avec le temps l’escale incontournable qui séduit tant de visiteurs en quête d’évasion. Une fois dans la ville, on peut faire une halte dans le souk de Ghardaïa, le plus grand de toute la région. Entouré d’arcades protégeant des entrées de magasins dont la majorité écoule des produits artisanaux, le souk est aussi un lieu de rencontre entre les sédentaires et les nomades de toute la région. Quant à la placette du marché, elle est occupée le vendredi par des forains venant de tout le pays créant à l’occasion une ambiance très particulière. Autre constat qui s’impose à l’esprit, les rues dans la cité, comme dans toute la pentapole, sont en escalier et ce, pour des raisons de défense et aussi pour permettre à l’air frais venant du bas de la cité de rafraîchir les maisons. Ainsi, cette architecture de la ville, qui a suscité un intérêt mondial considérable, a depuis des décades été surnommée la Mecque des architectes.
Une des villes du M’zab, Beni Izguen qui incarne parfaitement cette virtuosité architecturale qui fait tant la réputation internationale de Ghardaïa. Représentant l’une des cités de Ghardaïa, sa dénomination vient du fait que les premiers habitants de cette cité étaient les Ouled Annane dont l’un de leurs ancêtres s’appelait Izguen. Beni Izguen garde jusqu’à nos jours son aspect architectural initial. Il faut dire à son sujet que c’est la cité la plus conservatrice de la vallée. Le ksar de Beni Izguen comporte quatre portes principales et des portes secondaires dites "Kharjate". Il est entouré d’un mur d’enceinte avec des bordjs à différents endroits. Les maisons du ksar sont édifiées de façon à permettre à chaque foyer de recevoir les rayons de soleil, sans que cela gêne le voisinage. Pour eux, "la maison où le soleil entre ne recevra pas de médecin". Les cheminées sont disposées de telle sorte qu’aucune fumée n’incommode les voisins. En sortant de la cité de Beni Izguen vers le nord est, sur le flanc opposé de la vallée se trouve la cité de Melika. En sillonnant les rues, le visiteur découvre une cité qui abrite plusieurs sites anciens dont le plus connu reste le mausolée de Cheikh Sidi Aïssa. Le visiteur peut admirer également le minaret millénaire qui se dresse au milieu de la mosquée de la cité comme un éternel rappel de toute l’importance que revêt la religion dans la vie des habitants du ksar. "Ici, c’est la mosquée qui dirige tout ; seules comptent la loi du Coran et celle du Prophète", nous dira à ce propos un cheikh de Beni-Isguen pour nous expliquer que de toutes les villes de la pentapole ibadite du M’zab, Beni-Izguen est celle qui a su le mieux résister à l’assimilation. En fait, protégée par ses remparts, cette petite ville de 6.800 habitants que les guides touristiques décrivent volontiers comme "fanatiques" a su néanmoins préserver des institutions uniques dans le monde islamique.
Avec sa disposition qui a dû s’adapter au profil des collines rocailleuses de la région et un style architectural unique en son genre comprenant la mosquée au sommet de la colline et les commerces à ses pieds, la grande place du marché à la criée, et des ruelles labyrinthiques, Beni Izguen offre aux visiteurs un magnifique voyage dans le temps.
Dans son livre admirablement illustré, "Le M’zab, une leçon d’architecture" (Editions Sindbad, Paris), André Ravéreau explique très bien que ce qui caractérise l’architecture du Mzab, c’est une volonté de pauvreté, l’absence de toute décoration superflue des maisons, et une unité fondamentale qui reflète l’égalité sociale de tous les membres de la communauté. Cet esprit est largement perceptible dans les divers k’sours de la vallée : El-Ateuf, fondé en 1012, Bou-Noura (1046), Ghardaïa (1048), Beni-Isguen (1347) et Melika (1350). Soulignons par ailleurs que ces cités ancestrales ainsi que la vallée du M’zab, sont classées patrimoine culturel universel par l’Unesco depuis 1982.

Une exception algérienne
Contrairement à la Casbah où il ne se passe pas un jour sans qu’on ne déplore pas l’effondrement d’un vestige de la citadelle, les ksour de la vallée du M’zab n’ont pas cédé à l’usure du temps. Ils sont très bien sauvegardés. L’Unesco reconnaît elle-même que «depuis le XIe siècle et jusqu’aux années 1950, le M’zab avait conservé pratiquement le même mode d’habitat et les mêmes techniques de construction, dictés tant par un contexte culturel spécifique que par la nécessité d’une adaptation au milieu». A cet effet, de nombreux experts en la matière considèrent Ghardaïa comme une ville modèle qui, face aux nouvelles stratégies et aux nouveaux intérêts, a su rester fidèle à son architecture traditionnelle préservant ainsi son patrimoine d’une manière remarquable. Il s’agit bien là d’une exception algérienne au regard de l’état calamiteux de plusieurs autres centres historiques du pays. A Ghardaïa, fort heureusement, l’Office de protection et de promotion de la Vallée du M’zab (OPPVM) et la direction de la culture de la wilaya veillent quotidiennement à ce que les sites historiques de la cité ne soient pas détournés de leur vocation. Par ailleurs, des programmes de réhabilitation et de restauration sont régulièrement menés par l’OPPVM et les différentes instances de la wilaya. Ainsi, ces trois dernières années, plus de 900 maisons ont été restaurées dans les différents ksour de la cité et ce, en associant les citoyens, propriétaires de ces maisons, dans ce projet. Notons également que les monuments les plus importants de la ville ont fait, à maintes reprises, l’objet d’opérations de réhabilitation et de restauration à l’image de la célèbre place du marché où se trouve la «haouita», un vaste rectangle de pierre, qui servait de lieu de la réunion de la «djemaâ» où des célèbres notables élus par la mosquée se réunissaient, jadis à l’intérieur, pour effectuer les différentes transactions commerciales venues de l’extérieur et ordonner la vente aux enchères à la criée. Cette «haouita» était, en quelque sorte, le symbole de la hiérarchie mozabite, un local officiel en plein air pour l’administration de la ville. Les autorités locales, en collaboration avec l’OPPVM, ont réussi, il y a deux ans à sauver cet espace de la ville et ce, grâce à un programme d’aménagement et d’embellissement entrepris avec la collaboration d’un bureau d’architecture privé. Cette louable initiative a trouvé des échos favorables chez les citoyens et a permis par la même occasion de restituer à cette place du Marché, classée en 1985 patrimoine de l’Unesco.
Cependant, si les richesses culturelles et architecturales sont magnifiquement bien sauvegardées, le patrimoine environnemental de Ghardaïa est de plus en plus exposé au danger. En réalité, les palmeraies de Ghardaïa sont, préviennent plusieurs experts, en voie de disparition. Et pour cause, 20% seulement des palmeraies de la ville subsistent encore. Chaque année, plus de 1500 palmiers sont arrachés. «L’écosystème de la vallée est en danger. L’urbanisme sauvage et incontrôlé est en train de grignoter tout ce qui reste des palmeraies. Les autorités publiques ferment les yeux sur les constructions illicites qui s’érigent au plein milieu du oued M’zab. Croyez-moi, en cas de crue ou d’inondations, des milliers de vie humaine seraient déplorées à Ghardaïa», s’écrie Mohamed, guide touristique et membre de l’association Les Amis du Mzab qui n’a de cesse d’interpeller les responsables de la wilaya sur les dangers imminents des constructions anarchiques érigées ici et là. «Ghardaïa, c’est une ville qui ne peut supporter une population de plus de 40.000 âmes. Mais aujourd’hui, elle en compte plus de 100.000. Nous avons interpellé à maintes reprises les responsables de la wilaya pour les prévenir contre les conséquences que peut entrainer un urbanisme anarchique qui met en péril tout le système oasien de la vallée. Mais lorsque vous voyez toutes les bourgades qui naissent dans la périphérie de la ville, vous comprendrez que les autorités font montre d’un laxisme criant», explique notre interlocuteur.

Tafilalt : la nouvelle ville
Il y a dix ans, sur une colline rocailleuse, un projet unique en son genre a vu le jour à Ghardaïa. Ksar Tafilalt Tajdite est en vérité un nouveau ksar, surplombant Beni Izguen, qui compte plus de 800 maisons traditionnelles bâties dans le cadre d’un projet social à but non lucratif. Initié en 1998 par la fondation Amidoul présidée par M. Ahmed Nouh, Docteur en pharmacie et un des notables mozabites de la vallée du Mzab, le projet Tafilalt vise à rétablir certaines coutumes ancestrales basées sur la foi et le «compter sur soi» qui ont permis aux oasis en général et à celles du Mzab, en particulier, d’amadouer un environnement hostile et de bâtir ce qui est maintenant mondialement connu comme étant une architecture millénaire digne de l’appellation «développement durable ». Alliant les pratiques et les valeurs de cohésion et d’entraide sociales et les normes, selon les exigences que requiert l’habitat contemporain, Tafilelt est une ville nouvelle qui s’inscrit dans une optique écologique et sociale. «Tafilelt est pour nous un acte de militantisme. Et le militantisme est loin d’être seulement de la ‘’tchatche’’, sinon des actions concrètes en faveur de la société», nous confie M. Ahmed Nouh qui nous fait visiter le nouveau Ksar. «Notre principal objectif est de rendre le logement à la portée de tout le monde. Toutefois, nous ne voulions pas voir pousser dans notre vallée des cités dortoirs ou des ghettos comme c’est le cas dans le nord», décrète Nouh qui poursuite plus loin : «Le logement traditionnel du M’zab a été notre source d’inspiration dans la réalisation de ce projet. Tout en l’adaptant aux commodités de la vie contemporaine, tel que l’introduction de l’élément «cour» pour augmenter l’éclairage et l’aération de l’habitation ainsi que l’élargissement de ses espaces intérieurs, nous avons maintenu aussi la hiérarchisation des espaces, l’utilisation des matériaux locaux à l’image de la pierre, le plâtre et la chaux. On a maintenu également le principe des ruelles étroites qui s’entrecoupent pour casser les vents de sable. Tout cela est réalisé pour restituer l’esprit du ksar».
Pour M. Nouh et tous les autres responsables du projet de la ville nouvelle de Tafilelt, le patrimoine culturel ancestral peut, lui aussi, concourir à la résolution du problème du logement. Pour cela, les institutions sociales traditionnelles doivent intégrer l’héritage architectural ancien dans l’environnement rationnel du bâtiment. Dans la mise en oeuvre de son foyer, l’homme ne doit pas porter atteinte à l’environnement naturel. Ce sont là les axes les plus importants du projet de Tafilelt. «Face à la menace de la ‘’bétonisation’’ de la vallée, nous avons conçu ce projet pour proposer des logements à des prix modestes qui correspondent aux spécificités architecturales et culturelles de la vallée du M’zab. C’est pour nous aussi une nécessité de réagir à la disparition programmée de nos palmeraies», souligne à ce titre M. Nouh.
Concernant les bénéficiaires, ils sont éligibles, qur la base de critères étudiés. Ainsi, il est impossible de pouvoir accéder à un logement dans la ville de Tafilelt si on est déjà acquéreur d’un autre logement. «Le projet concerne uniquement la couche défavorisée et les gens nécessiteux dont le salaire ou les moyens financiers ne peuvent leur permettre d’avoir droit à un logement. Par ailleurs, l’apport personnel des bénéficiaires doit être de l’ordre des 30% à 40% du coût global de la maison qui peut aller de 1 à 2 millions de dinar, selon les trois modèles de logements disponibles. Le reste, le bénéficiaire le paiera, selon un échéancier et ce, après avoir pris possession de sa maison», fait remarquer M. Nouh.
Signalons, enfin, qu’un parc des espèces animales et végétales des zones désertiques, initié par la fondation Amidoul, est en cours de réalisation dans la périphérie de Tafilelt. Ce futur parc comprendra des espaces verts, une station d’épuration des eaux usées, une station d’énergie solaire, un laboratoire scientifique et une salle de conférences. A l’instar de Tafilelt, cet espace de verdure verra le jour dans une zone rocailleuse. Comme quoi, dans la cité des mille et une passions, on ne manque point d’imagination pour faire des déserts les plus inhospitaliers, des oasis enchanteresses. En clair, le nord du pays a beaucoup à apprendre du sud.

Semmar Abderrahmane in http://www.lemidi-dz.com/
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